Augustin Sokolovski
Le 17 mai, soit le 4 mai selon le calendrier julien, l'Église honore la mémoire de sainte Monique. Comme Émilie de Césarée (+375), Nonna de Nazianze (+374) et Anthuse d'Antioche (324- ?) – mères de Basile le Grand, de Grégoire le Théologien et de Jean Chrysostome – Monique fut l'une de ces épouses illustres qui élevèrent de grands docteurs du christianisme universel. Sans elles, l'histoire de l'Église et du monde aurait été différente. Les saintes mères des Pères de l'Église sont véritablement dignes de commémoration.
La mère du plus grand des Pères de l'Église d'Occident est née à Thagaste, l'actuelle Souq-Ahras en Algérie, en 331. À 22 ans, elle donna naissance à Augustin. En 371, à 40 ans, elle devint veuve.
Le mari de Monique, Patrice, ou, selon la transcription moderne, Patrick, fut baptisé avant sa mort. Une telle tradition, transformant le baptême sacramentel pour la rémission des péchés en un ablution avant la mort, était en effet répandue dans l'Antiquité. Paradoxalement, c'est l'enseignement ultérieur de son fils Augustin qui contribua à l'abolition de cette pratique.
La mort de son père ne modifia pas l'attitude du futur Père de l'Église envers le christianisme. Il était plongé dans des délires religieux et, comme l'apôtre Paul avant sa conversion, mais intellectuellement, il persécuta l'Église (1 Co 15, 9). Il niait le sens du christianisme et se moquait des fondements bibliques de la foi en Jésus-Christ dans l'Ancien Testament.
Sainte Monique pria pour son fils. Sa prière s'appuyait sur la conviction des chrétiens de l'Église carthaginoise que Dieu, par la puissance de sa grâce, peut changer la volonté d'une personne, la « briser » en la transformant en soif du bien (cf. Luc 14, 23). La foi, la prière et la patience de sainte Monique ne restèrent pas sans fruit.
En 387, dans la nuit de Pâques, le 24 avril, Augustin fut baptisé à Milan par saint Ambroise. Quelques mois plus tard, le 13 novembre, Monique reposa dans le Seigneur à Ostie, où se trouvait le port maritime romain. À l’époque moderne, les archéologues ont même retrouvé le lieu supposé de sa mort.
Outre son premier enfant, Augustin, Monique donna naissance à un fils, Navigius, et à une fille, Perpétue (+423). Cette dernière est également canonisée et vénérée comme une sainte.
La conversion d'Augustin au christianisme fut le fruit d'une recherche personnelle et d'une évolution spirituelle des plus complexes. Cependant, lui-même croyait et affirmait être devenu chrétien exclusivement grâce à la prédestination de Dieu par les prières de sa mère. Dans ses écrits ultérieurs, Augustin insista sur le fait qu'il en avait reçu la connaissance d'en haut par révélation divine lors de son ordination épiscopale.
Cette célébration de mai en l'honneur de la mère de saint Augustin est associée au transfert d'une partie des reliques de Monique de Rome à l'abbaye augustinienne d'Arrouaise, dans le nord de la France, en 1162.
Fondé en 1090, le monastère dédié à saint Nicolas avait besoin de l'intercession céleste particulière d'Augustin, dont la charte monastique le guidait. De toute évidence, la vénération du Père de l'Église lui-même était alors très grande en Occident. Augustin était appelé la « Matrice de toutes les conclusions » et le « Père des Pères ». Ses reliques reposaient à Pavie, dans le nord de l'Italie. Il était donc tout simplement impossible de transférer une relique du saint en France.
Au contraire, la vénération de Monique, la mère d'Augustin, ne commença à se répandre dans l'Église que sept siècles après sa mort. Mais au tournant des premier et deuxième millénaire de l'ère chrétienne, elle connut un essor considérable et continua de se propager de manière indicible jusqu'à nos jours. Il s'avère que le transfert des reliques en France et le début de l'épanouissement de sa vénération à cette époque sont étroitement liés.
Comme de nombreux sanctuaires, églises et monastères, l'abbaye des chanoines de Saint-Augustin, autrefois glorieuse, cessa d'exister après la Révolution française (1789). Cependant, liée aux circonstances de l'essor de ce monastère augustinien, le transfert des reliques de la sainte, par la mystérieuse prédestination divine, devint l'une des dates de célébration de la mémoire de Monique de Thagaste dans l'Orthodoxie.